Qu’est-ce qu’un dualiste ?

30 Nov 2009 par

Le couple basique fondamental qui génère tous les autres couples est : l’être  doubleleftright non-être. La question a été posée de savoir pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien. Le dualisme ne voit pas dans cette question, un problème de fond. Il admet simplement que « le quelque chose », l’être, ne peut exister sans le rien, le non-être, le néant, de la même façon que le rien est opposable à quelque chose. Le temps n’existant pas en lui-même, il ne peut être question de voir un commencement et une fin à ce qui est. La primauté de la poule ou de l’œuf est sans objet. Les choses sont ce qu’elles sont et elles ne sont datées que pour notre convenance personnelle. L’image du monde constitué de couples, s’enchâssant les uns dans les autres dont les éléments recherchent leur union pour s’annihiler par transformation de leur énergie dans un temps donné et essayer de se fondre dans le néant tout en étant repoussés est un constat et non un dogme. C’est ainsi que les événements se déroulent et évoluent. Le dualisme montre le « comment » et ne répond pas à l’éternel « pourquoi », où toute réponse entraîne toujours un autre pourquoi. Par le jeu des contraires et la recherche de leur résolution, le monde est le théâtre d’une pièce jouée par des paires d’acteurs qui se querellent dans un duel sans merci tout en ne pouvant se passer l’un de l’autre et en prenant soin de ne pas se détruire l’un l’autre, car l’un ne peut être sans l’autre. Chacun des contraires ne peut exister seul et est asservi à l’autre. Ce n’est, ni l’un, ni l’autre. Ils s’enrichissent l’un, l’autre, tout réside dans leur double liaison, leur rapport. C’est la structure qui prévaut. Les contraires se multiplient par bifurcations successives «oui-non» à partir du cercle de base « être  doubleleftrightne pas être » en commettant des fautes de reproduction permanentes permises par les degrés de liberté de l’expansion, constituant les écarts de probabilités, autour d’une inaccessible moyenne. L’être se dit de multiples façons, selon Aristote. L’une des alternatives du couple de base revient vers le néant. Nous ne pouvons avoir qu’une perception confuse de la diversité ainsi produite. Pour y voir plus clair, il faut chausser les lunettes du statisticien qui va faire surgir des rapports plus lisibles à notre échelle d’un fouillis d’événements microscopiques englués dans le brouillard de leur incertitude, par effet statistique de compensation.
Tout naît par dichotomie comme une sorte d’écartèlement du néant en deux pôles opposés. Tout le dicible n’est qu’un ensemble superposé d’oppositions.

L’indicible, l’ineffable, l’inexprimable, l’absolu, le zéro, l’infini, la moyenne statistique ne peuvent être que supputés. C’est le domaine de la non-opposition, du non-agir. Les contraires voudraient se réunir pour s’annihiler dans ce sans-nom pour y disparaître, mais ils en sont refoulés pour renaître de leur destruction. Ce que l’on considère comme réel n’est qu’un état fugace et provisoire qui porte en lui dès sa naissance le germe de sa propre destruction, issu d’un monde virtuel d’écarts de probabilités d’occurrence, distribués autour d’un milieu sans vie. Les oppositions transparaissent sur un fond de nullité.

La frontière entre le dicible et l’indicible est mouvante suivant les progrès de notre connaissance qui s’efforce d’établir des repères constants pour mieux jalonner un monde de hasard. Nous mettons ainsi une multitude d’étiquettes suivant les divers points de vue qui constituent le perçu. Le «su» s’organise aux dépens de l’insu ».

La conscience d’être vient de la confrontation des extrêmes. Dans la nuit de l’ignorance, enfermés dans la prison sans fenêtres où nous sommes incarcérés avec nos sens limités, nous essayons à tâtons de maîtriser le mieux possible ce qui nous entoure pour améliorer notre bien-être.
Tout pulse à des rythmes divers qui se superposent pour donner un univers dans une alternative ultime d’expansion ou de contraction. Les ondes provoquées par l’alternance des contraires s’entrecroisent dans tous les sens sans se détruire en se superposant suivant la thèse de Fourier. C’est un match sans fin entre l’expansion et la gravitation, la première l’emportant pour finalement faiblir et se laisser dominer par la deuxième dans une éternelle étreinte pugilistique.

La doctrine du dualisme qui nous vient du fond des âges implique une morale comportementale. Elle consiste à réduire son activité, à faire le gros dos, à se contenter de peu au lieu d’aller vers des satisfactions difficilement accessibles demandant une grande dépense d’énergie et dont on sait que cela peut donner lieu à des retours de bâton. Par le principe de compensation qui règne dans la nature, un excès de plaisir peut entraîner la souffrance. Il est bien entendu que la compensation ne joue qu’à grande échelle et sur le grand nombre. Un individu peut y échapper et passer sa vie dans un bonheur total ou dans un profond malheur. Mais l’expérience que nous avons acquise et celle de nos congénères, nous apprend que la succession du bon et du mauvais peut se produire à toutes les heures, tous les jours et tout le long de notre vie. Des périodes fastes ou néfastes peuvent se suivre. Lorsque les choses vont mal, il faut quand même en déduire qu’elles peuvent aller en s’améliorant. La morale dualiste conseille de rester dans le creux, en y oscillant le plus faiblement possible. Rien n’empêche, bien sûr, de succomber à un plaisir quelconque excessif, mais il faut s’attendre au contrecoup. Tout se paye, rien n’est gratuit. En dépensant le moins possible on se met à l’abri des coups quelquefois sévères du destin, sans garantie toutefois de ne pas en être victime. L’imprévisibilité des évènements ne doit pas nous empêcher de réduire notre voilure. Il y a bien sûr, dans cette attitude une espèce de négation de la vie et de ses surprenants aléas. D’aucuns considèrent qu’il faut brûler la chandelle par les deux bouts et profiter au maximum des joies de l’existence. C’est une réaction normale qui doit être tempérée par un réflexe de survie : « qui veut voyager loin ménage sa monture ».

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